Faisons parler les leaders – Premier violon et chef d’orchestre

Faisons parler les leaders – Premier violon et chef d’orchestre

16 January, 2015

Cette semaine, Me Dominique Tardif, de ZSA, s’entretient avec Me Jean-Michel Fournier chef des affaires juridiques pour Les Industries Dorel Inc…

1. Pourquoi avez-vous, à l’origine, décidé d’être avocat plutôt que de choisir un autre métier ? Le droit, c’est arrivé comment pour vous ? 

Je disais déjà, adolescent, que j’aimerais devenir avocat. Un ami de mes parents et certains parents de mes amis, l’étaient. Il s’agissait de gens capables de faire la part des choses, qui faisaient preuve d’aisance dans le discours et d’une façon de penser qui m’intéressait. C’était par ailleurs un métier qui semblait permettre de bien gagner sa vie.

Je venais pour ma part d’un milieu plus ‘régimenté’, plus ‘noir ou blanc’, ayant grandi dans un milieu militaire. J’aimais le fait que le droit amenait une façon de voir les choses dans leur ensemble, en considérant toutes leurs facettes et en faisant preuve d’une multitude de nuances. Parce que mon père était ingénieur, je pense qu’il n’était justement pas question pour moi de le devenir ! (rires)

Après des études universitaires en commerce à Concordia, j’ai travaillé chez Bell Mobilité, tout en démarrant vers 2002-2003, avec des collègues, une entreprise pour faire de l’affichage dans les tunnels du métro. Le projet n’a malheureusement pas fonctionné mais m’a donné l’occasion d’en apprendre plus sur la façon dont on organise une entreprise, sur les différentes formes juridiques qu’elle peut prendre, etc. Le sujet m’a intéressé et a constitué un point tournant en faveur du droit. Je me suis alors inscrit, d’abord pour ‘tâter le terrain’, au certificat, puis j’ai transféré au programme régulier. Mon choix fut donc le résultat d’un mélange de planification et de circonstances contextuelles.

2. Quel est le plus grand défi professionnel auquel vous avez fait face jusqu’ici ?

Mon plus grand défi, je le vis au quotidien, à titre de chef des affaires juridiques d’une entreprise d’environ 10 500 employés et ayant une présence, sur le plan opérationnel, dans plus de 25 pays en plus de distribuer dans une centaine de pays. Nous ne sommes que quarante-cinq au siège social, et comptons un petit département juridique de deux personnes.

Nous avons, dans les dernières années, fait un exercice d’optimisation fiscale. Beaucoup de transactions de fin d’année ont été liées aux structures fiscales, sans compter les contrats de prêts et paiements de prêts entre divisions. Nous avons par ailleurs adopté une stratégie de croissance par acquisition, que je coordonne. Lorsque je travaille sur une acquisition, j’ai forcément l’obligation de négliger temporairement certains autres aspects quotidiens de ma pratique. J’ai ainsi le défi d’avoir le rôle du premier violon en même temps que celui du chef d’orchestre : je dois être tantôt sur le terrain et tantôt du côté stratégique, en gardant un rôle d’exécutant en même temps que celui de conserver une vision d’ensemble des choses.

3. Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous à la pratique du droit ? 

Je crois qu’il existe un certain malaise quant à la formation donnée au Barreau : elle est à mon avis un peu déphasée. Je m’explique : le cursus de l’École du Barreau implique encore de préparer les avocats comme s’ils allaient devenir des généralistes, alors que cela correspond de moins en moins à la réalité d’aujourd’hui, compte tenu de la surspécialisation actuelle. Plutôt que d’approcher les choses en présumant que c’est à la pratique d’amener les gens vers leur spécialisation, pourquoi ne pas faire les choses différemment ?

Peut-être pourrions-nous créer des sous-catégories de pratique et adopter un cursus différent, en donnant par exemple l’occasion à certains de faire une partie de leur stage en entreprise pour mieux comprendre la réalité du monde des affaires, du client et de l’entreprise. Plutôt que d’essentiellement baser le cursus sur le Code civil, peut-être pourrait-on y ajouter des formations accessoires permettant une meilleure compréhension des affaires. En effet, l’entrepreneur ou l’avocat d’entreprise s’attend à ce que l’avocat qu’il engage soit un peu comme une extension de sa compagnie sur le plan juridique. Il faut pour cela que l’avocat sache mieux se positionner comme un partenaire stratégique d’affaires, ce que les comptables ont d’ailleurs mieux réussi à faire que nous, d’après moi. Et, pour cela, il faut nécessairement s’y connaître en matière de finance et d’opérations, et non seulement en droit.

4. La perception du public envers la profession et les avocats en général est-elle plus positive, égale ou moins positive qu’elle ne l’était lors de vos débuts en pratique ? Et pourquoi, à votre avis ? 

Au niveau du grand public, je pense qu’existe toujours une certaine appréhension vis-à-vis de la profession. Je pense par ailleurs qu’elle est probablement justifiée, comme on associe la profession au pouvoir judiciaire et au pouvoir politique : cela fait nécessairement un peu peur. Pourquoi ? Parce que la proximité du pouvoir suppose la possibilité de recevoir un traitement qui n’est possiblement pas accessible à la population en général. Ce n’est pourtant pas vraiment le cas ! N’empêche que les avocats sont perçus comme un instrument du pouvoir : maîtriser les mots, les contrats et la façon de se défendre en cour peut être intimidant et faire sentir aux gens qu’ils ne négocient pas ‘à armes égales’.

Je crois cela dit que la pratique est un peu moins formelle qu’elle ne l’était, et que le Barreau a fait un bon travail de sensibilisation en ce sens. Beaucoup d’initiatives ont été prises pour faciliter la pratique et offrir de bons outils aux avocats. L’avocat qui pratiquait seul en région avait autrefois difficilement accès à toutes les ressources nécessaires, alors que la situation est beaucoup plus facile aujourd’hui. Je crois que la plus grande accessibilité aux ressources rend les avocats plus performants qu’avant, et que cela influence positivement la perception.

5. Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un débutant sa carrière et voulant se retrouver, aussi rapidement, aux commandes d’un service juridique ? 

La première étape, c’est d’être un peu fêlé!! (rires). Il ne faut évidemment pas avoir peur de travailler fort. Pour ma part, j’ai trois enfants, je fais un MBA à temps partiel et j’ai un travail demandant ! Cela dit, mon travail fait partie intégrante de ma vie : je ne pense, pas qu’on arrive à des résultats en gérant son travail dans des plages horaires très définies. Mes enfants et ma femme sont ‘des dossiers’ aussi importants que mes conventions d’achat d’actions : je dois faire à tous de la place dans ma journée, et cela implique parfois d’oublier que je travaille et faire preuve d’une certaine maturité.

Je recommande par ailleurs aux jeunes de faire d’autres études ou d’acquérir une autre expérience de vie avant de se lancer vers le droit. Avoir un autre angle d’approche que celui du droit est bénéfique en pratique et permet d’avoir une contribution additionnelle à celle du droit.Enfin, il faut vouloir apprendre sans cesse : la connaissance est reine et maître, encore plus maintenant que dans le passé.

En vrac…

• Les derniers bons livres qu’il a lus : L’art de la guerre (auteur : Sun Tzu) et Good To Great (auteur : Jim Collins)

• Le dernier bon film qu’il a vu : Dallas Buyers Club (réalisateur : Jean-Marc Vallée)

• Sa chanson fétiche : TNT d’AC/DC

• Son expression ou diction préféré : Si vis pacem, para bellum (« Qui veut la paix prépare la guerre ») : quand tu es préparé pour toute situation et que tu le fais savoir, tu obtiens normalement ce que tu veux, et tu sais imposer une idée sans pour autant devoir faire la guerre.

• Son péché mignon : Les cigares cubains

• Son restaurant préféré : Leméac (Avenue Laurier Ouest)

• Le pays qu’il aimerait visiter : L’Écosse, pour y vivre quelques semaines dans une distillerie de Whisky

• Le personnage historique qu’il admire le plus (et pourquoi?) : Winston Churchill, un grand stratège militaire mais aussi un homme de lettres, un artiste et un auteur qui a tenu tête à l’empire nazi alors qu’il s’étendait.

• S’il n’était pas avocat, il serait…financier/investment banker!

Me Jean-Michel Fournier est Chef des affaires juridiques & Conseiller en Transactions pour Les Industries Dorel Inc. Il s’est joint à l’entreprise à la fin de 2011 et il a coordonné et dirigé les multiples acquisitions à l’international depuis ce temps. De plus, il a créé le département légal au sein de l’entreprise et il gère les affaires juridiques corporatives à l’échelle mondiale.

Avant de se joindre à Dorel, Me Fournier a agi comme Directeur des affaires juridiques chez un important manufacturier canadien. Dans ce rôle, il effectua plusieurs acquisitions et il prit part au processus de premier appel public à l’épargne de l’entreprise. Fort de ses connaissances opérationnelles, il a également piloté un important projet d’optimisation des processus du service à la clientèle. Me Fournier a débuté sa carrière dans un important cabinet de droit des affaires de Montréal.

En plus de son emploi, Me Fournier agit régulièrement comme conseiller auprès de jeunes entrepreneurs afin de les accompagner dans leur stratégie de croissance. Il assiste également plusieurs organismes à but non lucratif dont la Fondation des artistes du Québec.

Me Fournier a obtenu son baccalauréat en droit de l’Université de Montréal et il complète actuellement des études aux HEC Montréal pour l’obtention d’une maîtrise en administration des affaires. Me Fournier finaliste aux Prix ZSA des conseillers juridiques du Québec en novembre dernier dans la catégorie ‘Conseiller Juridique D’Avenir’.


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