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Faisons parler les leaders – Mario Welsh

30 January, 2013

Issu d’une famille d’entrepreneurs, Mario Welsh a pourtant toujours voulu, aussi loin qu’il s’en souvienne, devenir avocat. Cela et d’autres souvenirs, l’associé d’Heenan Blaikie les raconte à Dominique Tardif, de ZSA

Pourquoi avez-vous, à l’origine, décidé d’être avocat plutôt que de choisir un autre métier ? Était-ce “écrit dans le ciel” ou le fruit d’un hasard ?
Je viens d’un milieu d’entrepreneurs en construction ; il n’y avait pas de professionnel dans mon entourage immédiat. J’ai d’ailleurs moi-même eu ma propre entreprise de construction pendant dix ans : dès l’âge de 17 ans, j’avais mes camions et tout mon équipement, ayant commencé à travailler à mon compte quand j’étais au cegep. Je travaillais sept jours sur sept, je jouais au hockey et j’agissais comme “coach”, tout en faisant mes études, sur lesquelles je ne me concentrais donc pas entièrement, même si mes performances étaient acceptables sans être les meilleures.
J’avais toujours dit que je deviendrais avocat, sans trop pouvoir dire pourquoi. J’étais attiré par l’idée de penser que je pourrais défendre des gens. Je trouvais la profession noble et bien respectée, et j’aimais le fait d’avoir des interactions avec les gens.
J’ai donc d’abord fait un baccalauréat en histoire, question d’améliorer mes résultats académiques. Même si j’aurais pu entrer en droit après un an, je me suis permis de terminer mon diplôme pour ensuite entrer à la faculté de droit. Étant de Montréal, j’y travaillais et y étudiais. Quand est venu le temps de me trouver un stage, j’ai profité du fait que l’oncle de mon épouse démarrait un cabinet à Québec, pensant que le fait de m’éloigner de mon autre emploi me permettrait aussi de mieux me concentrer sur le stage et sur la pratique du droit. Et… je suis tout simplement tombé en amour avec la ville et le bureau ! C’est finalement mon frère qui a continué l’entreprise familiale.

Quel est le plus grand défi professionnel auquel vous avez fait face au cours de votre carrière ?
S’il est vrai qu’on fait parfois sa chance, je dois dire que j’ai eu l’opportunité de bénéficier de mentors qui m’ont rapidement ouvert bien des portes et donné accès à des dossiers vraiment intéressants. J’ai eu la chance de travailler sur plusieurs dossiers qui, pris isolément, pourraient faire la fierté d’un avocat. Travailler sur ces dossiers, c’était presque parfois comme ‘manger du caviar avec une pelle!’, ajoute-t-il en riant.
Cela dit, ma plus grande fierté est plutôt d’avoir été en mesure de ne pas faire de compromis, malgré mes dossiers, sur mes implications sociales et auprès du Barreau, outre mon implication au sein du cabinet dans ce qui touche à certains aspects de la gestion. Le défi réside dans le fait de savoir maintenir l’équilibre, tout en étant présent auprès de ma famille et en assistant aux compétitions de hockey de mes garçons et aux compétitions ayant mené ma fille jusqu’aux jeux olympiques ! Bref, j’ai une vie assez occupée, et je dois une fière chandelle à mon épouse qui m’aide beaucoup. Il n’y a évidemment pas de recette miracle, mais les résultats, je crois, dépendent ultimement de la façon dont ‘on met la table’.

Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous à la pratique du droit ?
La valorisation de la profession est un sujet qui me préoccupe beaucoup. Quand j’ai commencé la pratique, j’étais attiré par le caractère noble de la profession. Plus tard, j’ai constaté qu’elle avait perdu un peu de son lustre et qu’existait un manque de respect entre procureurs et confrères qui ne s’est, selon moi, pas amélioré suffisamment au cours des dernières années.
Nous avons chacun notre part de responsabilité à cet égard. L’accessibilité à la justice est, elle aussi, très importante : il faut cesser de compliquer et de surcharger les dossiers en les judiciarisant systématiquement alors qu’on pourrait les régler. Tout cela nous ramène à la valorisation de nos services et au fait que les clients ne doivent pas avoir le sentiment que le fait de consulter un avocat coûte nécessairement très cher. Individuellement, chaque cabinet et chaque avocat doit emboîter le pas à cette prise de conscience qu’a fait le Barreau dans les dernières années. Il est nécessaire de donner l’impression qu’on se soucie de son client et qu’on défend ses intérêts comme s’il s’agissait de notre propre argent, en étant attentif à la recherche d’une solution. En assumant notre part du travail et en faisant des efforts en ce sens, nous contribuerons à améliorer les perceptions et à valoriser la profession, qui en a besoin.

La perception du public envers la profession et les avocats en général est-elle plus positive, égale ou moins positive qu’elle ne l’était lors de vos débuts en pratique ? Pourquoi selon vous?
Je pense que la perception du public envers la profession a subi une importante baisse ces dix dernières années, et je ne sais pas si elle s’est vraiment améliorée depuis. Fait-on des efforts ? Oui, mais il reste bien du travail à faire. La médiatisation du judiciaire et de toute situation portant à critique, ne facilite évidemment pas les choses : l’accès et la critique très ouverte des orientations que prend un juge, par exemple,  n’est pas nécessairement avantageuse pour notre recherche de valorisation de la profession, à mon avis. Cependant, il est vrai, il est inutile de se battre contre cette ouverture et cette accessibilité : il faut simplement “mettre la barre plus haute” quant aux expectatives qui existent envers notre profession. Il revient aux avocats de réagir de façon à être le plus proactif possible, en posant des gestes qui démontrent que les avocats sont professionnels et qu’ils respectent le client et que, si certaines erreurs sont faites parfois, elles n’en demeurent pas moins de rares exceptions.

Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un débutant sa carrière et souhaitant réussir en pratique privée ?
La première chose qui importe, c’est d’aimer ce qu’on fait. Être avocat n’est pas toujours un métier facile et cela implique bien des responsabilités, comme le fait de gérer les problèmes des gens et parfois même leur avenir, d’où l’importance de faire non pas des choses qui nous sont imposées, mais des choses que l’on choisit par passion. Plutôt que d’accepter un emploi dans un secteur donné au motif qu’on a besoin d’un travail, il faut explorer les différents secteurs de pratique pour découvrir ce qui nous passionne. Une fois qu’on le sait, les choses deviennent beaucoup plus faciles.
Pour pouvoir ensuite maintenir cette passion, il faut aussi savoir se montrer proactif et demeurer en contrôle de sa pratique. Il faut être organisé et structuré, et c’est beaucoup plus facile à dire qu’à faire! Il est nécessaire de s’imposer la rigueur nécessaire soi-même,  plutôt que d’attendre que quelqu’un nous aide à créer les bons réflexes.
Enfin, il faut commencer, dès le début de sa pratique, à bâtir sa crédibilité. Peu importe les gens qui nous entourent, qu’il s’agisse de confrères, de greffiers ou de juges, il faut savoir les respecter, quel que soit leur échelon, pour bâtir sa crédibilité. Ce respect et ce contact que j’ai établis au fil des ans, m’aident, j’en suis convaincu, dans ma pratique de tous les jours. Cela ne signifie évidemment pas qu’on me donne toujours raison (!), mais je crois que j’ai l’oreille du confrère ou celle du juge. Personne ne peut effectivement affirmer qu’il est bon et qu’il a la vérité : la crédibilité réside dans le fait que les autres sont amenés à le dire à notre égard. La pratique en est alors facilitée et élargie, et il devient alors possible de ne pas toujours se retrouver dans une situation où l’on doive se battre ou où l’on est frustré de la réaction des autres à son égard.

En vrac…
• Les derniers bons livres qu’il a lus : La trilogie “Le Sanglot des anges”, auteur : Philippe Riboty. Il a par ailleurs dévoré tous les Dan Brown et les John Grisham qui ont été publiés ces dernières années.
• Le dernier bon film qu’il a vu : The King’s  Speech, réalisateur : Tom Hooper.
• Sa chanson fétiche : “Greensleeves”, il l’écoute d’ailleurs toujours quand il sort d’un procès.
• Une expression qu’on lui connaît : Amuse-toi !, “parce qu’il le faut avec le métier qu’on fait”, ajoute-t-il.
• Son péché mignon : La crème brûlée.
• Son restaurant préféré : Le Savini, Grande-Allée à Québec.
• Le pays qu’il aimerait visiter : La Grèce.
• Les personnages historiques qu’il admire le plus : Les grands découvreurs, dont Jacques Cartier, Christophe Colomb, John Cabot. Il admire ceux qui ont quitté leur pays, malgré le risque qu’ils couraient comme la terre était plate supposait-on, et sont partis conquérir le monde. Ils ont beaucoup fait évoluer les choses, et il estime l’audace dont ils ont fait preuve en allant vers l’inconnu.
• S’il n’était pas avocat, il serait… et cela ne vous étonnera pas, entrepreneur en construction.

Bio
Associé au bureau de Québec de Heenan Blaikie, Me Mario Welsh concentre sa pratique sur le litige civil et commercial, sur la responsabilité professionnelle ainsi que sur le droit de la construction. Ayant été lui-même entrepreneur, Me Welsh possède une expertise particulière de l’ensemble des aspects juridiques touchant le monde de la construction, y compris la responsabilité des professionnels. Me Welsh plaide régulièrement devant les tribunaux judiciaires de première instance et d’appel. Il a à son actif plusieurs causes de longue durée dans le domaine de la construction et autres secteurs du droit. De plus, il agit dans d’importants recours collectifs. Il a également été invité, au cours des dix dernières années, par différents ordres professionnels et intervenants du domaine de la construction à agir en tant que conférencier. Les organismes du milieu de la construction font souvent appel à lui pour contribuer à la révision des contrats normalisés applicables à ce domaine. Depuis plusieurs années, selon le sondage annuel effectué par Lexpert auprès de la communauté juridique, Me Welsh est classé parmi les avocats fréquemment recommandés dans le domaine de la construction. Depuis 2008, il figure dans les prestigieux répertoires The Best Lawyers in Canada ainsi que Canadian Legal Lexpert Directory pour son expertise en droit de la construction. Il a également été nommé Avocat de l’année en droit de la construction par Best Lawyers en 2013. Me Welsh est membre de différents comités du Barreau du Québec, tels que le comité sur les recours collectifs et le comité sur le guide des meilleures pratiques. Il est également président du Fonds d’indemnisation du Barreau. Il est également membre du comité de direction de la section de droit de la construction de l’Association du Barreau canadien – division Québec. De plus, il a récemment été nommé au conseil d’administration de la Fédération aquatique du Canada, est président de Synchro Canada et président du Comité du Fonds d’indemnisation du Barreau du Québec.