Cette semaine, Dominique Tardif rencontre Me Nicolas Vanasse. Il lui parle de sa carrière et des défis de son entreprise Aveos.
Me Nicolas Vanasse est le Vice-président, Chef des affaires juridiques et Secrétaire d’Aveos.
Pourquoi avez-vous, à l’origine, décidé d’être avocat plutôt que de choisir une autre profession?
Ça a été, dans mon cas, un processus que je qualifierais d’évolutif. Je voulais comprendre comment fonctionne la société. J’ai étudié en sciences politiques et relations industrielles, pour ensuite me diriger vers le droit. L’idée était de me donner une bonne formation de base, sachant que le droit mène à beaucoup de choses. Je connaissais peu le milieu à l’époque, n’étant pas de ceux qui viennent d’une famille d’avocats. Une fois en droit, il y a eu la course aux stages et j’ai choisi Stikeman. Si j’ai été surtout intéressé, au départ, par le droit criminel et international public, j’ai rapidement su, après mes premières transactions, que c’était plutôt cela que je voulais faire.
Quel est le plus grand défi professionnel auquel vous avez fait face jusqu’ici?
Je pourrais nommer plusieurs dossiers complexes sur lesquels j’ai travaillé – comme le premier appel public à l’épargne des Pages Jaunes ou la restructuration que nous venons de compléter chez AVEOS.
Mais le plus grand défi aura été de quitter Stikeman pour me joindre à Aveos avec pour objectif de créer un département juridique qui n’existait pas encore, alors que la compagnie réalisait la vente à KKR et la monétisation.
J’ai travaillé au développement d’un système de gouvernance et de gestion de risques, à la standardisation des contrats, etc. – tout cela en passant à travers les changements qu’a vécus l’industrie.
J’ai modifié et ajusté mon approche, et me suis assuré d’offrir des conseils d’affaires vraiment basés sur des résultats.
En entreprise, les conseils et les décisions que l’on prend affectent la stratégie, la culture et les objectifs de l’entreprise, de même que des milliers d’employés. La réponse de l’avocat doit être basée sur les résultats qui doivent être obtenus, et ne se limite pas au fait de donner un avis indiquant les risques et enjeux d’une décision – une décision qui doit être prise par moi, après que j’en aie soupesé les risques.
Autrement que la réduction des frais juridiques, que changeriez-vous à la pratique du droit?
Quant à la pratique du droit en général, je crois qu’il faut améliorer l’accès à la justice par l’identification de moyens avant-gardistes et moins dispendieux. Et je ne réfère pas seulement ici qu’à la résolution de litiges: on dit souvent que ‘la prévention, c’est meilleur que le remède’. Je suis d’avis qu’il faut trouver des techniques qui aident les membres de la société à éviter les litiges.
Les gens devraient mieux savoir reconnaître quand un problème juridique est susceptible de se poser, savoir comment sélectionner l’avocat qui devrait les représenter, connaître suffisamment la loi pour savoir ce qu’elle peut leur apporter comme bénéfice selon les situations, etc. Je crois qu’il faut rendre la justice accessible à des gens autres que ceux qui sont à un bout et l’autre du spectre, à savoir les plus nantis et ceux qui ont accès à l’aide juridique. Et je pense, ici, aussi à plusieurs PME qui se situent entre ces deux pôles.
Et comment on réussit à faire cela?
Il faut la volonté politique de le faire. Et cela peut se faire de différentes façons, dont par la reformulation du code de procédure, par l’éducation du public, etc. La société doit en venir à voir la loi comme un avantage, et non seulement comme un inconvénient à gérer lorsque survient un litige.
La perception du public envers la profession et les avocats en général est-elle plus positive, égale ou moins positive qu’elle ne l’était lors de vos débuts en pratique? Et pourquoi, à votre avis?
Je ne pense pas qu’elle a beaucoup changé depuis mes débuts – mais il faut dire que cela fait seulement 10 ans que je pratique!, ajoute-t-il en riant. Je crois que la perception qui existe va au-delà de la mauvaise compréhension du public quant aux bénéfices que la profession juridique peut apporter. Je ne crois en effet pas que la société voit l’avocat comme un instrument aussi important pour elle que ne l’est par exemple un médecin, dont l’apport est mesurable et généralement incontesté.
Ce qui, par ailleurs, tient probablement du rôle même de l’avocat, qui est non pas de rester neutre mais de prendre parti, de défendre une des deux parties à une même situation et de faire valoir son interprétation par opposition à une autre.
Comment devient-on vice-président affaires juridiques en moins de 10 ans de carrière? Quels sont les conseils que l’on donne à un jeune avocat qui a l’ambition de faire la même chose?
Je crois qu’il faut bien sûr être au bon endroit au bon moment! D’abord, il faut s’instruire et vivre différentes expériences, tant sur le plan personnel que du travail. Je suis aussi d’avis que, pour éventuellement faire carrière en entreprise, la meilleure façon est de commencer en pratique privée. Le travail en cabinet offre une bonne expérience et un contact avec des dossiers qui permettent d’acquérir de bonnes connaissances de base dans un environnement très axé sur le service à la clientèle. Ce qui est certainement un atout considérant que, en entreprise aussi, nous avons aussi nos clients, internes cette fois.
En vrac…
•Dernier bon livre que vous avez lu – « Ru » (Auteur : Kim Thúy)
•Dernier bon film que vous avez vu – « Origine » (Réalisateur : Christopher Nolan)
•Restaurant préféré – Le Club Chasse et Pêche (rue St-Claude)
•Pays que vous aimeriez visiter – Le Japon
•S’il n’était pas avocat, il serait… propriétaire d’un restaurant!
Bio
Me Nicolas Vanasse a remporté le Prix du conseiller juridique d’avenir 2010 lors de la remise des Prix des conseillers juridiques du Québec du 2 novembre dernier.
Il est entré au service d’Aveos en mai 2007.
A titre de Vice-président, Chef des affaires juridiques et Secrétaire, il fournit à Aveos une expertise en matière de droit et de réglementation axée sur les résultats et élabore des méthodes et des processus en conformité avec l’ensemble des lois et règlements, en plus d’assurer la mise sur pied et la direction d’une équipe de services juridiques dynamique et soucieuse d’offrir des services rapides et efficaces.
En 2009 et 2010, il a protégé avec succès les intérêts d’Aveos pendant qu’Aveos et l’industrie aéronautique étaient confrontés à des défis sans précédent.
Membre de l’équipe de direction et du conseil d’administration durant cette période, son leadership a été un élément clé dans les négociations avec les multiples intervenants durant la restructuration d’Aveos afin de réduire sa dette d’environ 700M$ et d’assurer sa croissance future.
Me Vanasse était auparavant avocat du secteur du droit des affaires chez Stikeman Elliott, où il travaillait dans le domaine des valeurs mobilières; il s’occupait également de la conclusion de transactions variées pour des sociétés clientes ainsi que de questions de conformité à la réglementation. En 2005, il a pratiqué au bureau de Londres de Stikeman Elliott.
Il est diplômé en droit civil de l’Université d’Ottawa et il a également étudié à l’Université Laval en science politique et en relations industrielles.